♈ Y a vingt minutes, t'étais encore à l'appart. Pas en train de te préparer, de te pomponer, ni rien. T'en avais rien à foutre de plaire ou pas pour ce rendez-vous. Oweïs, c'était pas un ami, ni un ennemi. Juste un mec qui te collait et qui tentait de te draguer. Mais toi, c'est pas ton genre de mec, et le rateau que tu lui avais foutu, y a quelques semaines, il doit s'en rappeler. Pourtant, il voulait pas te lâcher. Comme si t'allais craquer. Tu craqueras jamais pour lui. Il est pas assez viril pour toi, et le peu de nuit que vous aviez passé ensemble, tu l'avais interrompu, t'en pouvais plus de le dominer, t'aime pas dominer, t'aime te faire guider, malgré le fait qu'en dehors des petites parties comme ça du soir, tu diriges tout. Et puis même, il est pas doué. La preuve, il t'avait invitée, hier, au Mcdo. T'y avais pas cru au début. Mais bon, t'avais accepté. Et donc, y a vingt minutes, tu te préparais pas, tu te pomponais pas, mais t'essayais de te tirer du lit, de bouger, de pas lui foutre un vent quoi, parce que d'accord t'avais pas envie d'y aller, mais tu t'es dit que ça pourrait être amusant, alors tu t'es levée, tu t'es habillée sans te négliger ni t'abuser, enfin on vient comme on est au Mcdo, non ? Le fast-food était pas loin de chez toi et ta coloc, alors t'avais décidé de t'y rendre à pieds. Puis quand t'arrive, tu le rejoins à sa table, mais tu t'installes pas, parce que faut commander votre menu. « C'est sympa comme rendez-vous ça, tiens. Tu t'améliores, chapeau. » tu lâches, d'un ton ironique. Et tu vas faire la queue, le laissant en plan. Il va te rejoindre, au pire.

♈ Il se met à grogner derrière ta réplique et cela te fait froncer les sourcils. Mais tu les dérides rapidement, car justement, ton but est de l'enfoncer. Pas d'être méchante, de l'insulter ou quoi que ce soit, mais de l'enfoncer, pour lui faire comprendre qu'il te plaît pas. Il accoure et te fixe longuement, et tu le dévisages insolemment. « T'as décidé d'être sympa aujourdhui ou pas ? » lâche-t-il. T'esquisses un sourire sarcastique, fière de toi, et tu soupires, les yeux au ciel. « Tout dépend de comment tu te portes, mon chou. » Tu plisses les paupières d'un mouvement sensuel, juste pour le faire marcher. Peu à peu, la queue diminue pour te laisser face au caissier. « Bon alors pour moi ce s'ra menu maxi best of, big mac et grande frite, coca. Avec une boîte de nuggets, boîte de 6, en complément. » Morfale. Tu te décales pour que Oweïs commande sa note à son tour.

♈ Il soupire suite à l'expression que tu utilises pour le qualifier. « M'appelle pas comme ça c'est moche. » Tu soupires toi aussi. Il commande sa note et semble adresser le genre de sourire colgate au caissier, enfin, vu le sourire, tu supposes que celui-ci est plutôt destiné à la bimbo d'à côté. Non mais franchement les gens de nos jours. Tu le vois soudain payer ta part et la sienne et tu râles dans ta barbe. Puis il prend ton plateau, tu t'apprêtes à le lui piquer des mains, mais ça paraitrait ingrat aux yeux des autres personnes présentes actuellement. Tu le suis comme un petit chien, faisant mine de te plaire ici, alors que c'est le parfait contraire. Tu t'installes en face de lui mais te mets un peu en diagonale par rapport à lui, c'est pas un dîner en amoureux ni même un dîner en tête à tête, en fait c'est juste un rendez-vous freestyle que t'avais prévu de boucler après ton maxi best of englouti. « Bon app. » tu déclares en te forçant sur les bords.

♈ « Cimer blondie, toi aussi. » lance-t-il, tout sourire. T'aime pas quand il te parle comme ça, comme si vous étiez potes depuis toujours là, avec ce sourire que t'aime pas non plus, qui fait branleur, tout ce que t'aime pas chez un mec. T'aime les mecs sauvages, déterminés, grands, des mecs plus âgés que toi. Enfin c'est hors-sujet ça non ? « Eh, tu crois que si je lui balance une frite dans la tête elle arrête de me regarder ? » Tu sais pas de quoi il parle dans un premier tempset tu tournes la tête à gauche à droite pour apercevoir une rousse – tête à claques au passage – le mater. Son visage est couvert de tâches de rousseur, et ses cheveux faut même pas en parler. Poil de carotte. Puis il s'adresse à elle, et tu veux pas t'y mettre. Tu relèves simplement qu'elle part en colère, très vite, et tu souffles. « T'as toujours rien d'autre à foutre toi tss. » Tu secoues la tête, style « ahh, pauvre France. »

♈ Il soupire, encore, et toi de rire. « En même temps si je faisais rien elle allait me violer. » Tu soupires à ton tour. « Pff, toujours les bonnes excuses, t'façon ça t'aurait pas déplu. » Puis il engage la conversation là, une conversation de potes, ce qui te fait froncer les sourcils. « Sinon quoi de beau dans ta vie ? » T'as soudain une réplique de chez et t'hésite pas pour la balancer. « Toujours pas toi, en tout cas. » Fière de ta raillerie, tu affiches un sourire de victoire. Son portable vibre, t'en profite pour examiner la salle, voir si y a du nouveau dans les minettes. Pas grand chose visiblement, puis c'est plus trop l'heure, il est un peu tard pour le déjeuner à présent. Il semble ignorer l'appel et te fixe avec un semblant d'admiration. Tu te mets à manger toi aussi, et en voyant qu'il t'admire encore, tu arrêtes de mâcher ton hamburger. « Bon t'as fini d'me mater là ? » T'aurais bien voulu que la rousse reste, en fait.

♈ Il râle, la mine vexée et déçue. « Mais c'est quoi ton problème à toi ? D'accord je te plais pas mais c'est pas une raison pour me parler comme ça. J'essaie d'être cool et tout toi tu fais aucun effort tu me saoules. » Alors comme ça, tu le saoules ? P'tit con. P'tit con qu'il est. Tu vas pas t'abstenir de lui faire remarquer, d'ailleurs. Puis il louche sur une nana avec un beau cul, des hanches pas très fines, mais à la gueule pas attrayante, et il semble encore déçu. Ambiance pourrie, rendez-vous de merde, interlocuteur de merde. « Écoute, moi j'essaie de pas être méchante avec toi mais apparemment t'accepte rien, j'fais des efforts hein. Donc si ça te va pas j'me casse, non ? » Tu te tapes le front de dégoût. Cette conversation est sans intérêt alors tu te rattaques à ton bic mac, ayant vite la bouche pleine.

♈ Il hausse un sourcil, ça commence à légèrement te saouler d'être ici avec lui alors que t'aurais pu sortir en soirée, bon d'accord c'était pas trop l'heure mais c'était mieux que de traîner avec un bon à rien. Il semble plus savoir quoi dire mais en grand doué qu'il est il trouve forcément un sujet, qui, – soit dit en passant – est de plus en plus merdique. « Sinon t'as un épi. » Hm. Intéressant. Non. Je dirais même plus que ça. Génial. Dans le vent. Un sujet passionant. Pour le faire chier, tu t'ébouriffes les cheveux, et allez ouste l'épi, maintenant ta coiffure se barre en sucette et voilà. Pan. « Ah bon ? » Insolente. Il se met à chantonner un truc qui t'est inconnu, sûrement un truc sorti de ses écrits, qui te passionent pas vraiment là. Tu te plaques les mains devant les yeux, sur les oreilles t'aimerais bien, en fait t'aimerais avoir quatre mains : deux pour te cacher les yeux et pas le voir, deux pour te boucher les oreilles et pas l'entendre. Franchement, t'essaie de faire des efforts, t'essaie, tu te forces à être aimable, mais franchement, t'y arrive pas, c'est trop dur.

♈ Il fronce les sourcils une nouvelle fois, avec la mine de celui qui a plus du tout envie de plaisanter et tu soupires, yeux vers le ciel, désespérée. « Pourquoi tu m'apprécies pas ? » Ah ça mon gars y a pas à tiquer elle t'apprécie pas déjà. Et elle t'emmerde. Si elle pouvait elle t'en mettrait une mais une belle. Tu te ronges les ongles pour dissimuler ta rage mais rien y fait, t'es trop furieuse, t'en peux plus. Il se met à chanter, et par surprise, tu te saisis de ses joues de gamin, les maintenant bien entre tes mains, et tu lui plantes un baiser sur les lèvres. T'essaie d'y mettre du tien, tu fais en sorte qu'il aie l'air réel, et bien que ce soit vraiment mais vraiment par obligation pour qu'il la boucle, tu joues le jeu jusqu'à ce que tu décroches ta bouche de la sienne. Soudain, tu remarques que tout le monde te mate, et tu leur pointes à tous ton joli majeur, avant de t'enfuir pour sortir. T'as pas honte, t'es pas gênée, et ça t'a rien fait, rien. C'était juste pour qu'il la boucle, qu'il la boucle, qu'il la boucle enfin. Et en fait t'as pas spécialement pensé à vérifier si il l'avait bouclée, parce qu'en voyant tout le monde te mater avec mépris, ben t'es sortie. Puis en plus si le personnel a vu ton joli doigt, t'as chaud au cul.

♈ Et allez, ce con il te rejoint dehors en courant là, il se décolle pas de tes basques, c'est bon, t'en as marre. Puis il te demande ce qui t'arrive et tu l'ignores, tu marches d'un pas décidé vers la sortie, prenant le premier trottoir et courant jusqu'à l'arrêt de bus pour le semer. T'es venue à pieds et t'aurais très bien pu revenir à pieds aussi si il t'avait pas poussée à bout ainsi. En l'entendant tenter de te ratrapper, tu lui pointes ton joli majeur à lui maintenant, pour qu'il renonce. C'est bon, tu le reverras plus jamais, tu refuseras catégoriquement quand il te reproposera un rendez-vous du genre, mcdo ou pas. Un peu ça va mais faut pas pousser le bouchon. Un bus arrive et t'as juste à faire une enjambée pour y monter. En lançant un signe d'au revoir à Oweïs, tu souris d'un air sarcastique. « Adios, p'tit cœur. » Tu vas t'installer à côté d'un mec, un beau spécimen, puis t'attends.

Spoiler:

Ça y est, t'es dans le bus en direction de chez toi et t'as enfin réussi à t'affirmer devant lui. Tu réalises quand même plus tard que t'y as été un peu fort avec lui, même si c'est un peu ce que tu cherchais quoi, enfin il te voulait pas de mal au fond, il essayait juste de te conquérir et bien qu'il y soit pas parvenu, parce que t'es une petite difficile et que de toute façon les minets du genre, ben c'est pas ton genre. Donc voilà les excuses ça te connait pas mais tu veux bien reconnaître que t'as pas été aussi tendre que tu le voulais avec lui. Alors arrivée chez toi tu vas j'sais pas, lui envoyer un petit message ou texto pour admettre que t'es une lâche, que t'es qu'une vilaine fille et que si il veut pas que tu lui refasses du mal, vaut mieux pas que vous vous revoyiez. Ça va pas être simple à digérer mais c'est comme ça. On te cherche pas, toi.